Le règne des émotions



Mercredi 1 Juillet 2015

Entre le nouveau film du studio Pixar et la déferlante d’émoticônes, les émotions sont au centre de nos préoccupations. Même, elles auraient tendance à devenir les héroïnes de la vie quotidienne.


Le règne des émotions
Dans « Vice-Versa », le nouveau film d’animation du studio Pixar, les personnages principaux sont des émotions. S’ils ont forme humaine, héros ou anti-héros représentent des sentiments : colère, dégoût, joie, peur, tristesse… Sans surprise, le film fait un carton. Surtout, en s’inscrivant dans l’air du temps, il montre à quel point nous mettons aujourd’hui, les émotions au centre de nos préoccupation. L’époque est à l’écoute des sentiments. Parfois jusqu'à l'excès.
 
On peut le voir tous les jours avec les émoticônes et autres Emoji qui transitent de smartphones à tablettes, et de tablettes à smartphones. En tout, six milliards seraient échangés au quotidien à travers le monde. D’ailleurs, devant le succès exponentiel, de nouveaux Emoji sont attendus pour l’année prochaine. En attendant, ils sont presque devenus une nouvelle forme de langage. Demain, ils remplaceront codes PIN à quatre chiffres et mots de passe.
 
Surfant sur le même courant, des livres de développement personnel ou « self-help » en Anglais, sont attendus d’ici quelques mois, destinés notamment aux enfants. Pourquoi ? Pour leur apprendre à gérer leurs émotions pardi. Les enfants, toujours eux, peuvent d’ailleurs déjà bouloter les bonbons Oasis d’Haribo : ou comment avaler des icônes fruits, content, pas content, en colère, souriant…
 
Pourtant, cette omniprésence des émotions pose question. En effet, est-ce que la tendance ne va pas dans le sens où il devient facile, voire réducteur de limiter « le comportement humain à une poignée d’émotions, (et ainsi) passer à côté de sa complexité ? », rapporte Elle. Pour la psychanalyste Sylviane Giampino, co-auteure de « Y a-t-il encore une petite enfance ? Le bébé à corps et à cœur », paru chez Erès, « c’est une manière de masquer les états d’angoisse, d’ambivalence et toute la palette des émotions liées à l’interaction avec les autres, comme la honte, l’humiliation, le mépris, la pitié, l’hésitation, l’embarras, l’inhibition… »
 
En allant plus loin, on peut se demander si ce déferlement d’émotions et cette façon de les privilégier, n'est pas une manière de s’inscrire dans « une société infantile, privilégiant les pulsions à l’intelligence de la pensée ? », comme on peut le lire dans Elle. La vie est peut-être un peu plus complexe que sa représentation en émoticônes...

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