Un emploi se perd, un autre se créé
Les propos recueillis par le journaliste du Monde Jean-Baptiste Chastand auprès de David Dorn, économiste au Centre des études monétaires et financières (Cemfi) de Madrid, ne sont pas réjouissants pour la classe moyenne. Victime de l'informatisation dans les entreprises depuis les années 70, elle subit une baisse de l'emploi. Mais selon David Dorn, un emploi détruit pour cause d'informatisation ne conduit pas forcément à une baisse du niveau total de l'emploi. En effet, l'informatisation a avant tout amélioré la productivité des entreprises et des industries, permettant de faire baisser les prix des biens et services et donc d'augmenter le pouvoir d'achat. Les perdants, ce sont néanmoins les licenciés qui ne retrouvent pas forcément d'emploi similaire au même niveau de rémunération.
Des emplois menacés... d'autres moins
Alors que les emplois liés à des tâches répétitives ont été supprimés avec l'avènement des ordinateurs, des logiciels et de l'Internet (activités de stockage, de classement, de comptabilité...), d'autres emplois plus "abstraits" sont quant à eux préservés, voir en développement. Il s'agit des emplois centrés sur la résolution de problèmes complexes, sur la négociation et la prise de décision ou encore sur le leadership. Typiquement, ce sont les managers, les avocats ou encore les ingénieurs, dont les salaires sont ceux de la tranche la plus élevée. C'est pourquoi l'économiste parle de polarisation de la société autour de deux groupes : les hauts et les bas salaires, que ce soit en France ou dans toutes les économies développées. A noter tout de même quelques exceptions d'emplois moins menacés, comme le métier d'infirmière dont les tâches ne pourront pas être suffisamment informatisées pour être remplacé et qui devient toujours plus indispensable du fait du vieillissement de la population.
Une polarisation exacerbée aux Etats-Unis
David Dorn observe que le phénomène de polarisation est le plus visible aux États-Unis où, dès les années 80, l'écart s'est fortement creusé entre les tranches de salaires. Les diplômés y sont rémunérés 1,5 à 2 fois plus que les non diplômés, ce qui ne se vérifie pas en France, du fait que l'offre d'emplois pour les personnes très diplômées est inférieure à la demande. La différence s'explique enfin par le maintien du SMIC en France qui donne une garantie d'un salaire plutôt élevé pour des emplois faiblement qualifiés, dispositif qui n'existe pas aux États-Unis où les bas salaires ont au contraire décru.
A lire : L’informatisation est-elle responsable du chômage ? Propos recueillis par Jean-Baptiste Chastand. Le Monde du samedi 8 mai.
A lire : L’informatisation est-elle responsable du chômage ? Propos recueillis par Jean-Baptiste Chastand. Le Monde du samedi 8 mai.